N°1 – Sokourov

ÉDITORIAL

ALEXANDRE SOKOUROV

UNE AUTRE VISION DE L’ART DU CINÉMA

La programmation de différents festivals qui se sont tenus en Suisse a fourni la matière de ce numéro. Alexandre Sokourov et Claudio Pazienza au Festival documentaire de Nyon (Visions du Réel), Guy Maddin au festival fantastique de la Chaux-de-Fond, (aujourd’hui le Festival international du film fantastique de Neuchâtel), Pierre Carles au Festival du film de Locarno : comme quoi notre Confédération Helvétique ne laisse pas toujours les activités culturelles Hors-Champ.

La venue d’Alexandre Sokourov à Nyon fut sans conteste l’évènement du festival. Inconnu ici jusqu’au début des années nonante, il reste aujourd’hui méconnu du public occidental, tout comme du public russe par ailleurs. Il faut dire qu’il a souffert de la censure depuis son premier film, tourné en 1978 (sorti en 1987 !) et que son adulation en Russie comme enfant-martyr révélé par la glasnost a été brève. Plusieurs raisons nous ont incité à nous pencher sur son art : l’atelier qui lui consacra Nyon, la projection de ses films au festival et à la cinémathèque suisse et enfin les propos recueillis à St-Pétersbourg par un membre de la rédaction. Pour ces raisons, nous consacrons un dossier à Sokourov, dont l’originalité de l’œuvre nous semble proposer non seulement une autre vision du monde, mais également de l’art du cinéma.

Bien que Guy Maddin s’inscrive dans un tout autre genre, il y a entre ces deux réalisateurs un lien qui les unit. C’est la fascination et l’attachement aux formes artistiques du passé à partir desquelles ils créent un nouveau cinéma. Ils s’inspirent de la tradition pour faire des films qui nous surprennent par leur originalité. Ce qui parait être à première vue un paradoxe se trouve au fond du problème postmoderniste. Alors que le modernisme rejetait toutes les formes du passé déclarées désuètes et usées, le postmodernisme semble dénoncer cette intransigeance en revendiquant, entre autres, le retour à la tradition.

A une époque où l’on fait le bilan des grandes révolutions du XX siècle, le cinéma joue, par sa double fonction, un rôle primordial. La première, qui est celle d’enregistrer et de conserver le témoignage d’une époque. La deuxième fonction, qui complète en quelque sorte la première, c’est justement celle dont nous parlent les cinéastes rassemblés dans ce numéro. Par leurs expérimentations, leur tâtonnement et leurs interrogations, ils nous rappellent que le cinéma n’est pas l’instrument servile de la réalité, mais qu’il est là, au contraire, pour la mettre à l’éprouve. Cela signifie parfois donner plus d’importance aux éléments laissés hors-champ.


La rédaction


SOMMAIRE

 

3         Éditorial

4       Pas vu pas pris, un infanticide médiatique

Entretien avec Pierre CarlesCarmen Crisan

7       Le Madman des prairies

Entretien avec Guy Maddin – Marie-Aline Hornung

9         « I think I feel a story coming on »: bons et mauvais narrateurs

  dans Tales from the Gimli HospitalMarie-Aline Hornung

 

11      Sensibilité chagrine : Dossier Sokourov

Repères biofilmographiques Antoine Cattin

13      Atelier : Simple Élégie                                          

        Compte renduElena Hill et Marie-Aline Hornung

15    L’apprentissage de la mort

Analyse – Le Deuxième cercleMichaïl Iampolski

22      Vers une archéologie expérimentale

            Analyse – Elena Hill

25      Sur le tournage du dernier film de Sokourov aux studios Lenfilm

            Regard – Antoine Cattin

29      L’acteur chez Sokourov : une profession pour amateur

            Analyse – Antoine Cattin et Elena Hill           

36      Ostrov Sokurova: L’île Sokourov Lire l’article

Entretien – Antoine Cattin 

41      Bibliographie

 

42      Les chutes d’Icare

Entretien avec Claudio Pazienza – Carmen Crisan       

 

 

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